19 juill. 2013 - 13:03
Un homme allongé sur le sol et le front tuméfié, l’image continue de susciter l'indignation des internautes. Hier après-midi jeudi, 200 policiers ont été mobilisés pour venir chercher le corps sans vie de Deng Zengjia face à une population de Linwu très remontée. Car pour les habitants de cette ville du Hunan, le vendeur de pastèques âgé de 56 ans est bien mort sous les coups des chengguan, les policiers municipaux.
Balance à pastèques sur la tête
Il était près de dix heures du matin ce mercredi 17 juillet, lorsque 7 ou 8 agents de la police urbaine sont venus demander à monsieur Deng et son épouse de déplacer leur chariot à fruits au motif qu'ils n’avaient pas l’autorisation de vendre à cet endroit. Très vite, le ton monte : Injures, menaces verbales, les agents finissent par s’éloigner mais pour revenir 1/2 heure plus tard. Ces derniers confisquent alors quatre pastèques et tentent d’emmener la femme de monsieur Deng dans leur voiture selon la famille de la victime citée par les
Nouvelles de Pékin. Nouvelles invectives, les coups pleuvent ! La victime aurait été frappée avec la balance en fer servant à peser les pastèques affirment des témoins. Une version aujourd’hui démentie par les policiers alors qu’on attend toujours les résultats de l’autopsie. Méfiante, la famille a demandé à être présente lors de l’examen du corps. La conférence de presse annoncée pour hier après-midi a finalement été annulée. Les journaux officiels ont pour consignes de ne pas relater l’évènement et les mots
« vendeur de pastèques » sont censurés sur internet rapporte le
China Digital Times. Les policiers de Linwu ont démenti la version des proches. On attend donc maintenant les résultats de l’autopsie. Mais comme souvent dans ce genre de cas, les autorités locales tenteront probablement avant d'étouffer l'affaire en monnayant le silence de la famille.
Des policiers municipaux détestés
Délit de faciès, harcèlement... Les vendeurs ambulants, comme les mendiants ou les prostitués, sont régulièrement pris à parti par les agents de la police urbaine chargés de veiller à
« l’harmonie » des villes. Une mission en contradiction avec l’urbanisation à marche forcée initiée par le gouvernement central et destinée à nourrir la croissance chinoise. Les campagnes continuent d’affluer en effet vers les villes pour bénéficier des fruits de la croissance et de l'ouverture du pays. Malheureusement les places sont chères. Certains se retrouvent à la marge et donc sur le trottoir confronté aux tristements célèbres
chengguan. Ces altercations parfois mortelles reviennent ainsi régulièrement à la Une de l'actuialité et provoquent la colère de l’opinion. La police municipale étant de surcroît régulièrement accusée de rançonner les commerçants ambulant. Entre juillet 2010 et mars 2012, les médias chinois ont rapporté plus de 150 cas d'abus commis par les
chengguan affirme l'organisation Human Right Watch. En juillet 2009, un vendeur de fruits de Canton s’est retrouvé paralysé sous les coups des chengguan. En 2011, la mort d’un vendeur unijambiste, qui transportait ses articles en poussant une charrette à bras dans la ville d’Anshun (province de Guizhou) a déclenché des heurts violents entre la population et les forces de l’ordre. Et récemment encore, les images de policiers frappant une mère enceinte de 8 mois ont fait le tour du web. En réaction, plusieurs intellectuels interpellent aujourd'hui le gouvernement. Li Chengpeng en appelle même directement au président chinois Xi Jinping :
« Si vous ne pouvez pas protéger un vendeur de pastèque, comment pourrez vous réaliser le rêve chinois » interroge ce vendredi l’écrivain et journaliste au quotidien de Chengdu sur son
compte weibo (lien ICI) ?
Actualisation du billet :
Selon les internautes, le secrétaire général du parti communiste de Linwu aurait reçu un diplôme de "maintien de l'harmonie", en récompense de ses bons et loyaux services. Le couple de maraîcher ambulants voulait selon l'agence Xinhua, s'installer dans "un endroit pittoresque de la rivière où les agents de la gestion urbaine avaient interdit la vente".
897 000 yuans de "compensation"
On va vite pour enterrer les morts encombrants en Chine. Titre des Nouvelles de Pékin ce samedi matin 20 juillet : "Les funérailles du vendeur de pastèque sont terminées, la famille remercie le gouvernement de Linwu". L'autopsie a révélé que Deng Zengjia est mort des suites d'une "traumatisme crânien avec hémorragie interne" affirment les autorités. La victime a probablement "recu un coup avant sa mort" ajoute le rapport d'autopsie. Les policiers municipaux ont reconnu avoir confisqué quatre pastèques aux couples de vendeur.
L'agence Chine Nouvelle fait état de son côté d'une "compensation versée à la famille du vendeur de pastèques". Le fils de la victime affirme que les autorités locales ont promis de verser à la famille 897 000 yuans d'indemnités (un peu plus de 110 000 euros).
Reuters 21 juillet 2013 6 policiers municipaux sont suspectés d'avoir causés des blessures intentionnelles. Ils ont été placé en détention dans la prison de Chenzhou samedi.
Sina.com 22 juillet 2013 Circulez il n'y a rien à voir ! Les habitants de Linwu ont été invités à "ne plus parler de "l'incident survenu au vendeur de pastèques"
Image SinaNews.com
Le ressentiment contre les
chengguan n'est pourtant pas près de retomber. Selon le
South China Morning Post daté du 22 juillet, la police municipale a battu un autre vendeur ambulant cette fois à Harbin dans la province du Heilongjiang dans le nord du pays. Les photos de la victime ensanglantée ont fait également le tour du web.
L'explosion survenue samedi 20 juillet à l'aéroport de Pékin a achevé de réveiller les consciences. Un handicapé en fauteuil roulant a fait sauter une bombe artisanale pour dénoncer les brutalistés dont il a été victimes de la part des policiers municipaux. Les fait remonte à 2005. L'homme conduisait un taxi au noir. Il s'est fait arrêter. Les policiers l'ont frappé et il est ressorti de l'altercation paralysé. Comme pour de très nombreux pétitionnaires, sa plainte n'a jamais été prise en compte par la justice. D'où cet acte désespéré destiné à se faire entendre. Son histoire a suscité
l'empathie des internautes et des médias autour du kamikaze (l'incident n'ayant fait aucun blessé en dehors du porteur de l'explosif). Il est grand temps de faire la réfome des
chengguan crie l'opinion. Plus facile à dire qu'à faire tant que le gouvernement central continuera à pousser les Chinois vers les villes afin de maintenir la croissance et le développement du pays.
Sur le même sujet :
Global Times 20 juillet 2013
Condemn violence, not chengguan system. Pas question de remettre en cause le système dit le très nationaliste et très pro gouvernement central Huanqiu Shibao dans sa version anglophone.
Et sur des faits plus anciens :
3 Comments
Je me demande bien, quand on est policier, comment on peut arriver au stade de battre à mort un vendeur de pastèque dans la rue...
Ca me dépasse complètement.
google
C'est d'avantage ici me semble-t-il une question de manque de contre-pouvoir et donc d'abus de pouvoir de la part de certains membres de la police urbaine chinoise. La famille ici n'a pas souvent le choix. Quant aux théories sur "les Chinois et l'argent", elles me rappellent une époque nauséabonde que l'on aimerait ne pas revivre
Les chinois avec la cupidite a l'argent ,la famille du defunt va tres vite considerer la mort de ce pauvre gare comme un acte deja consomme et elle prend l'argent et la vie continue c'est tout .C'est un peuple qu'on ne peut pas s'appitoyer .