15 déc. 2012 - 12:08
"Ce matin un homme fou a attaqué 22 enfants dans une école élémentaire en Chine. Mais tout ce qu'il avait sur lui, c'était un couteau. Nombre de mort ? Zéro" Le documentariste américain Michael Moore sait pitcher un film, il sait aussi résumer les faits en 140 signes.
Le tweet du réalisateur de Bowling for Columbine résume en effet ce qui est survenu a quelques heures d'intervale dans la seconde puis dans la première économie du monde.
En Chine : Il était 7 h 40 vendredi matin, lorsqu’un homme âgé de 36 ans s’en est pris aux enfants, à l’entrée de l’école primaire de Chenpeng dans le compté de Guangshan de la province la plus peuplée du pays. 22 élèves et une femme ont été blessés à l'arme blanche. Les victimes ont été conduites à l'hopital. L’agresseur a été interpellé. Il souffre de désordres psychologiques selon l’agence
Chine Nouvelle et la presse locale.
SCMP 15.12.2012
Aux Etats-Unis, les téléphones portables n'ont également pas arrêté de sonner dans les poches des jeunes victimes. Mais cette fois, personne n’a répondu aux parents désespérés. Le tueur présumé, âgé de 20 ans, était armé de deux pistolets, un Sig Sauer et un Glock selon le
New York Times. Arrivé à 9h30 dans l’établissement, il a abattu froidement
20 élèves et 6 adultes dans deux salles de classes. Il s’est ensuite suicidé selon les autorités citées par le journal américain.
Xinhua 14.12.2012
Dans les deux cas, les causes sont connues.
« La plus évidente est le manque de prise en charge pour les personnes atteinte de maladie mentale » affirme ce samedi le
Shanghaiist. Mais si la Chine connait ce type d’agressions,
« le nombre de morts est moins élevé, le contrôle des armes fonctionne »
Comme les Etats-Unis, la Chine a en effet connu plusieurs attaques d’écoles ces dernières années. Tout le pays a tremblé en octobre dernier, lorsqu’un homme armé d’une machette a attaqué une garderie du comté de Pingnan dans la province du Guangxi. Trois enfants ont été tués et 13 autres blessés. La vague la plus violente remonte à 2010. Il y a deux ans, au moins 16 enfants ont été tués et 60 autres blessés dans une série d'attaques visant des écoles primaires et des maternelles des provinces du Fujian, du Guangxi, du Guangdong, du Jiangsu et du Shaanxi. Les médias chinois n'ont d'ailleurs pas manqué cette fois encore de critiquer les officiels de Guangshan pour le manque de sécurité autour de l'école. Ces derniers ont même été accusés par l'agence officielle de vouloir étouffer l'affaire, "de jouer aux jeux à leur bureau" ou de "se cacher" pour éviter d'avoir à répondre aux questions.
A la différence des Etats-Unis en revanche, la Chine dispose de lois strictes sur le contrôle des armes. Une réglementation qui n’est pas là d’ailleurs seulement pour protéger les citoyens, mais d’abord pour permettre au système de se maintenir. Le régime chinois est en effet obsédé par sa propre sécurité. Voilà pourquoi, un peu avant les Jeux olympiques, les métros de Pékin ainsi que la plupart des gares du pays se sont équipés de détecteurs de métaux aux entrées. « Nous sommes comme les Américains, nous voulons la liberté » nous a confié un jour un automobiliste coincé sur une autoroute enneigée de la province du Shandong (Est). Avant d’ajouter : « Sauf qu’ici, nous sommes désarmés face au pouvoir. »
Michael Anti, journaliste spécialiste des questions internationales et de la Chine en particulier, et défenseur des libertés sur internet
Comparaison n’est donc pas raison, car finalement elle n’a pas lieu d’être. Le débat sur le port d’arme n’existe en réalité qu’aux Etats-Unis, pays de la National Rifle Association (N.R.A.), autrement dit l'association des mordus de la carabine et du pistolet, officiellement à but non lucratif, mais en réalité véritable lobby pro-armes. Partout ailleurs, des législations existent heureusement pour contrôler la vente des armes et la Chine ne fait pas exception.
De nombreux internautes chinois ont d'ailleurs critiqué le black out médiatique autour de l'attaque du Henan, repprochant notamment aux autorités locales d'avoir voulu dissimuler l'incident. Le manque de structures pour accueillir les malades mentaux en Chine a également été dénoncé, avec le risque que ce genre d'évènement se reproduisent laissant la communauté scolaire désarmée.
Le massacre de Newtown ne peut donc justifier le système ultra sécuritaire du régime chinois et la censure de l'information, mais pour la première fois peut-être, la Chine peut faire la leçon aux Etats-Unis -on notera que jusqu'à présent, c'était souvent voir toujours dans l'autre sens"-. Elle ne s'en prive pas d'ailleurs : "
Les victimes innocentes réclament d'urgence un contrôle des armes" affirme ainsi l'agence
Chine Nouvelledans une dépêche signée de Washington.
A lire sur le sujet :
Los Angeles Times 15.12.2012 "In China, victims in School attack survive"
Huffington Post 15.12.2012 "Chine: Un homme poignarde 22 enfants devant une école de la région du Henan"
ABC 15.12.2012"22 Kids Slashed in China Elementary School Knife Attack"
China Digital Times 15.12.2012 "School Violence in China and Us Spurs Reflection, Debate"
Ministry of Tofu 19.12.2012 "Chinese media accused of 'crying only for American Kids', ignoring domestic school rampage"
Le Monde 28.12.2012 "Armer les professeurs : Après la tuerie de Newton, l'idée fait son chemin aux Etats-Unis"
La NRA du pain béni pour la presse officielle en Chine, Global Times 28.12.2012
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