RP made in DPRK

Happy birthday Mr. Président ! Ce ne sont pas des œufs de pâques, mais un lanceur qu’ont découvert dimanche les journalistes de 21 médias étrangers invités par la Corée du Nord. Nos confrères doivent assister au lancement prévu cette semaine d’un « satellite d'observation » à l’occasion des commémorations du 100 ème anniversaire de la naissance du président Kim Il-sung... 

   

Quelques caractères et un chiffre à la peinture bleue sur un fuselage blanc immaculé : « Unha-3 ». La 3ème « galaxie » -en coréen- sera donc la grosse bougie sur le gâteau des commémorations du 100e anniversaire du fondateur de la République Démocratique de Corée du Nord le 15 avril prochain.

En invitant la presse étrangère, Pyongyang entend prouver que sa fusée est bien un engin spatial et non un missile longue portée comme le craint la communauté internationale. 70 journalistes ont ainsi pu s’approcher à une cinquantaine de mètres du lanceur pour le vérifier fait savoir ce lundi matin l’agence Xinhua.

L'AFP, AP, Reuters, la BBC, CNN, NHK, ARD et parmi les Chinois le Huanqiu Shibao étaient sur le site de lancement de Sohae hier -cf. vidéo ci-dessous

 
Une petite porte en fer, un interphone, depuis ce matin les journalistes se bousculent au consulat nord coréen de Pékin. La casquette vissée sur la tête du soldat de garde à l’entrée ne bouge pas d’un millimètre.
 
Ce sont les yeux qui tournent et balayent l’horizon de droite à gauche. Les lèvres s’entrouvrent quand les visiteurs s'approchent : « Patientez un petit peu, s’il vous plaît !».
 
 
40 petites minutes plus tard, la porte s’ouvre effectivement. Une grande fresque colorée du « grand » leader et du « cher » leader Kim Il-sung et de son fils Kim Jong-il accueillent les visiteurs à l’entrée. Aucun portrait en revanche du petit dernier de la dynastie des Kim, l'actuel président Kim Jong-eun.

Un air de flute des Andes

 
Et nous voilà dans la salle d’attente ! L’endroit est désormais familier, c’est là que nous sommes venus il y a quinze jours pour demander notre visa.
 
Dans la pièce ouverte derrière le guichet, un air de flutes des Andes et une ambiance jungle tropicales s’échappent des téléphones portables.
 
Depuis le matin le consulat ne répond pas et on comprend mieux pourquoi ; devant l’insistance frénétique des appels, les deux fonctionnaires à l’accueil préfèrent visiblement laisser les batteries de leur téléphone mourrir d'épuisement.
 
 
La flute des Andes et l'ambiance tropicale sonnent donc sans discontinuer, tandis que dans la salle un petit groupe d’une trentaine de Japonais court de tables en tables. Vite un tube de colle ! Ici c’est une photo qui a été oubliée, là ce sont des photocopies qui passent de mains en mains. « Nous appartenons a une association d’activistes et nous aimons la Corée du Nord » nous explique un membre du groupe dans un anglais hésitant.
 
Dans les fauteuils, deux confrères de l’agence Associated Press patientent eux aussi. L’un est basé au bureau de l’agence à New Delhi, l’autre à Pékin et tous les deux espèrent obtenir un visa pour prendre l’avion demain à 9h.
 
Deux journalistes Australiens sont dans le même cas : « AP dispose d’un bureau à Pyongyang ce qui n’est pas notre cas » affirme alors l’un d’eux visiblement sceptique sur l’issue de sa requête.  
 
En matière de communication, Pyongyang ne s’y prend finalement pas autrement que les multinationales du libéralisme triomphant.
 
Pour vendre le produit et avoir un impact médiatique maximum, priorité est donné aux grandes agences et aux télévisions ! Du coup, les téléphones ont rugit ce matin dans les bureaux des correspondants de presse installés à Pékin.
 
Certains confrères vennaient de découvrir dans les dépêches l’existence de cette surprise party en DPRK, d’autres cherchaient à vérifier qui était du voyage ou non : T’en es ou pas ? Toi non plus alors ? C'est de toute facon Pyongyang qui a ici le dernier mot, les journalistes étrangers étant rarement les bienvenus en Corée du Nord.
 

Spectacle à guichet fermé 

 
Le régime de Kim Jong-eun est passé maître en matière de relations publiques. Ce week-end a Ningbo –Est de la Chine-, le ministre chinoise des Affaires Etrangères Yang Jieshi a une nouvelle fois fait part de son inquiétude à ses homologues Japonais et Sud-coréens.
 
 
 
La Chine qui a beaucoup bataillé pour la reprise des négociations à six sur la dénucléarisation de la Péninsule, craint en effet que le coup de la fusée ne vienne tout remettre en cause. Trop tard ! Clic Clac, la photo est bonne ! Au Nord de Pyongyang près de la frontière chinoise, le pas de tir du lanceur Unha-3 était au même moment photographié sous toutes les coutures
 
C'est évidement la déception au bureau de RFI à Pékin. Comme la plupart des correspondants ici, nous avons été redirigés voici dix jours sur les représentations diplomatiques de nos pays respectifs. Pour apprendre finalement vendredi, que les places pour le spectacle était sold out !
 
 
Dommage, nous nous contenterons de regarder le feu d'artifice à la télévision. Le régime nord-coréen promet dors et déjà un spectacle grandiose : Le satellite « d’observation de la Terre » baptisé Kwangmyongsong-3 devrait « croiser l’orbite du soleil ». A ce moment précis, des chants à la gloire du « soleil de l’humanité » retentiront dans les hauts parleurs de Pyongyang où seront organisé de gigantesques défilés. 
 

 

Des chants en l'honneur de Kim Il-sung mais également pour son fils Kim Jong-il, mort le 17 décembre 2011 dans son train blindé.

Au consulat nord coréen de Pékin, les deux journalistes d'AP ont obtenu leur visa. Trois confrères Equatoriens et deux Philipins sourient eux aussi. 
 
Le préciseux sésame en main, ils peuvent même prendre le temps de se photographier devant la fresque colorée à l'entrée. Un air de flute des Andes, une ambiance tropicale... Les deux Australiens ont moins de chance, pas cette fois leur a-t-on répondu au guichet.

 

2 Comments

Je ne vois pas à qu'elle pensée unique vous faites allusion lorsque nous disons que les dirigeants nord-coréens sont passés maîtres en matière de communication. Par ailleurs, quand Washington demande aux journalistes actuellement à Pyongyang de se méfier d'une "opération de communication", c'est effectivement l'hôpital qui se moque de la charité. Je vous laisse en revanche l'entière responsabilités de vos propos concernant d'autres situations ou d'autres pays qui ne sont pas cités dans ce billet. Nous en resterons donc au titre de cet article à savoir raconter les Relations Publiques façon République Démocratique et Populaire de Corée.

La pensée unique en Occident règne sans partage. Au moins dans les AUTRES cas de totalitarismes, les propagandistes n'arrivent pas à convaindre tout le monde. Mais ici, quand il s'agit de l'Iran, de la Corée du Nord ou même de Cuba, vous finissez par croire aux informations que vous inventez vous-même.

Pour ma part, je trouve intéressant que les Nords-Coréens aient atteint un tel développement scientifique et technique malgré les aggressions de toute sorte auxquelles ils sont soumis depuis le bombardement de leur pays par les Américains lors de la guerre de Corée.

Pour vous en convaincre, vous n'avez qu'à les comparer aux Africains et autres Centraméricains ou Caraibéens colonisés, dominés et exploités par l'Occident capitaliste. Peut-être que vous croyez que les Africains (du continent et la diaspora) ne sont qu'une bande de retardés incapables d'accéder aux progrès scientifique!

Certes, le régime nord-coréen, la quasi-déification des Kims, me paraient bizarres à moi aussi, mais je trouve les monarchies européennes également stupides et ridicules avec leur constante célébration des Will, Kate et autres...