Agnès de 5 à 57

Elle a cinq ans Agnès Varda. Cinq ans, ou à peine plus, lorsqu'elle s’émerveille devant le portique chinois rouge enfance qui marque l’entrée de sa nouvelle exposition au Musée de l’Académie des Beaux Arts de Pékin. « Toute vieille que je suis, j’ai encore des réactions d’enfants » confie celle qui s’amuse encore de ses blagues et des images rapportées de son premier voyage en Chine en 1957. Des photos et une pleine malle d'objets ! Des papiers découpés, un masque de l'opéra chinois, des cariatides qui portent une 2CV, nous aussi nous sommes beaucoup amusés à cette exposition inaugurée ce week-end dans la capitale chinoise.

 

Agnès Varda déballe les malles de son premier voyage en Chine en 1957. Cela donne un joyeux et très ludique bric brac au premier étage du Musée de l'Académie des Beaux Arts de Pékin. C’est aussi et surtout le secret de l’éternelle jeunesse que nous propose de découvrir la « grand-mère de la nouvelle vague » -83 ans-. En 1957, la plupart des étrangers qui sillonnaient le pays étaient des "conseillers soviétiques" : « J’étais alors une jeune photographe parfaitement inconnue et maintenant le travail de 'madame papate' -allusion à l’une de ses œuvres déjà montrée à la Fondation Cartier- est exposé en Chine se réjouit presque incrédule la jeune plasticienne qu'elle est devenue.» 55 ans plus tard, Agnès Varda est de retour au Musée de l’Académie des Beaux Arts de Pékin.

 

 

 

Sous la marée des images, la plage

Tiens c'est drôle, on entend la mer ! Sous son installation vidéo, Varda a fait des petits pâtés et déroule les vagues qui viennent lécher les pieds des visiteurs -diaporama ci-dessous-. Ca s’appelle les plages d’Agnès Varda en Chine 1957-2012. Du coup, les pelles, les seaux et les rateaux sont de sortie. Il y a même des transats ! Et la Chine dans tout ça ? C'est dans la salle juste à côté, rebaptisée pour l'occasion le "pavillon des souvenirs". "Tout est de 1957 assure la cinéaste !" Les papiers découpés et les marionnettes chinoises remplissent les vitrines, une pleine malle d'objets ramenés de son premier voyage 

 

Nous sommes donc en 1957. Invitée avec une délégation française par le gouvernement de Zhou Enlai, Agnès Varda parcours les villages et photographie les Chinois. Clic clac ! Un noir et blanc tendre et souriant.

 

 
 
Les plages d’Agnès Varda en Chine 1957-2012 donnent à la fois l'occasion de se retrouver « comme dans un rêve éveillé » disait à l’inauguration le réalisateur chinois Jia Zhangke, mais aussi de redécouvrir la Chine d’avant la mondialisation.
 
 
La Chine d’avant le made in china
 
On redescend et on remonte. On les reprendrait même presque en courant, quatre à quatre, les marches qui montent le long des grands murs blancs de ce beau musée Pékinois. Juste pour revoir la tête des visiteurs devant ce masque de l’opéra chinois porté par une statue de plâtre. Au "pavillon des souvenirs", Agnès Varda commente les vitrines. Les jeunes spectateurs s’approchent : « Votre carte de Pékin dans la vitrine elle est très belle se lance, timide et en anglais, une jeune fille. Elle date de 1957 ? Aujourd’hui vous savez la plupart des veilles maisons et des petites rues ont disparues de la capitale. » Une autre en français : « Ah vous avez fait du bateau dans la région des Trois Gorges ? Aujourd’hui ce n’est plus possible avec les barrages… »
 

 

L’humour permet d’oublier ce que deviennent les grandes idées une fois passées à la moulinette de l'Histoire.  « C'était alors la période des cent fleurs, on avait l'impression d'une certaine ouverture d'esprit » dit Varda. « Moi je suis petite et avec les Chinois j'étais comme eux à l'époque. De dos ça passe, c'est de profil que les gens étaient étonnés » s'amuse-t-elle encore en appuyant sur le bout de son nez.

 

 

Les plages d'Agnès Varda en Chine 1957-2012 sont accompagnées d'une restrospective inédite de son oeuvre du 10 au 18 avril 2012. Programmes, infos et contacts sur les sites de Kaiguan culture et de l'Institut Français de Chine.

 

 

 

1 Comments

très touchant, tendre, émouvant. Et on apprend beaucoup sur une madame patate. Merci Stéphane