Ce n'est pas la première fois que la Corée du Nord qualifie le président américain de « singe ». Début mai dernier, la Korean Central News Agency affirmait déjà qu'Obama lui « rappelait un singe noir méchant. » L'agence centrale nord-coréenne n'a pas pour habitude de mâcher ses mots. Le recours à l'insulte ou au registre animalier est récurrent lorsqu'elle s'adresse aux dirigeants sud-coréens. Un « rat » ou de la « pourriture sur pattes » pour qualifier l'ancien président Lee Myung-bak, une « vieille pute » pour l'actuelle chef de l'Etat Park Geun-hye.

« Enfants morveux »

« Obama est toujours imprudent en paroles et en actes comme un singe dans une forêt tropicale », affirme cette fois la Commission Nationale de Défense nord-coréenne. Pyongyang n'a visiblement pas digéré le fait que le président américain ait encouragé la sortie de The Interview dans les salles aux Etats-Unis à Noël. Un film dont le synopsis repose sur l'assassinat du président Kim Jong-un ainsi que sur une compilation de blagues nulles contre les Asiatiques. La comédie a visiblement fait peur à son producteur. Sony Pictures a dans un premier temps fait savoir qu'il renonçait à la sortie en salle en raison d'attaques informatiques de présumés hackers nord-coréens, avant de se rétracter face aux pressions des médias américains. Et le film a finalement pu sortir. 

Des insultes suivies, comme à chaque fois, par des menaces : « Si les Etats-Unis continuent à être arrogants (…) en dépit des avertissements répétés, ils devront garder à l'esprit que leurs actions politiques ratées entraîneront inéluctablement des coups mortels » poursuit un porte-parole de la commission cité par Le Monde. Les autorités nord-coréennes se veulent évidemment blanches comme neige et renvoient la balle à l'envoyeur. Ce serait Washington qui aurait perturbé le réseau internet nord-coréen : « Les Etats-Unis (...), si honteux qu'ils jouent à cache-cache comme le feraient des enfants morveux, ont commencé à perturber le fonctionnement d'Internet des principales institutions de notre république. »

Culte de la personnalité

C'est celui qui le dit qui y est ! En matière de puérilité et de suceptibilité mal placée, la Corée du Nord n'a rien à envier à ces grands enfants mal élevés que sont les Etats-Unis. On imagine mal en effet les patrons du FBI tordus de rire devant un film narrant par le menu l'assassinat d'un président américain en exercice, mais on voit aussi très bien pourquoi Pyongyang est encore plus « touchy » sur le sujet. Les dirigeants nord-coréens font l'objet d'un véritable culte de la personnalité en Corée du Nord. L'image de la famille Kim est sacrée et tout ce qui vient l'écorner est immédiatement perçu comme une atteinte à la sureté de l'état.

Cela vaut pour l'ingénieur sud-coréen de la zone industrielle de Kaesong qui utilise le quotidien officiel comme du papier toilette et s'essuie le séant sur la face des dirigeants nord-coréens dont l'image est omniprésente dans le journal. Cela vaut aussi pour cette vidéo parodiant un combat entre Kim Jong-un et Barack Obama sur le mode des jeux d'arcade. Pyonyang a demandé sans résultat la suppression du clip à Pékin. La vidéo est devenue virale l'été dernier sur le web chinois. 

A (RE) LIRE sur ce blog : Chine, la vidéo de Kim Jong-un qui fâche Pyongyang

Escalade raciste

Le syndrome de la tourette dont semble être atteint la propagande nord-coréenne est encore accentué par une avalanche de clichés discriminants utilisés dans les dernières prises de paroles de Pyongyang. L'escalade raciste étant encore plus marquante quand les dépêches de KCNA ne sont pas traduites en anglais. Selon le blogueur Josh Stanton, l'organe officiel du Parti du Travail de Corée a ainsi estimé dans un communiqué en coréen que Barack Obama devait « vivre comme un singe dans un zoo naturel africain, et se contenter des miettes de pain jetées par les visiteurs ». De quoi s'interroger sur ce que peut en penser le diplomate du basket, Dennis Rodman, qui se présente lui même comme l'un des meilleurs copains de Kim junior.

A (RE)LIRE FP 8 mai 2014 : Obama Don't Take It Personnaly, North Korea Just Hates Black People 

Traiter un noir de « singe » n'est malheureusement pas propre à la Corée du Nord. Encore récemment, la Ministre de la Justice en France a été victime de ce même cliché raciste. Même chose en Corée du Sud, où les noirs de l'armée américaine ont souvent fait l'objet d'insultes et de discrimination dans les bars et les bordels fréquentés par les GI's. Le racisme à la peau dure en Corée. Dans un sondage publié par le Washington Post en 2013, plus d'un Sud-coréen sur trois affirmait ne pas souhaiter avoir de voisins « d'une autre race ».

Mythe de la race pure

Le phénomène est ici renforcé par les comédies dites « Black faces ». Des actrices et des chanteuses coréennes se griment en « Africaines » lors de shows télévisés. Cela se veut bon enfant, nous sommes là pourtant bien loin de la « revue nègre » et d'une Joséphine Baker incarnant la femme libérée des années folles en Europe. Exemple avec cette émission du printemps dernier sur la chaîne publique KBS qui a fait scandale au sein de la communauté expatriée en Corée du Sud (voir lien ci-dessous).

A (RE)VOIR KBS 29 juin 2014 : Gag Concert 

A (RE)LIRE Groove 11 février 2014 : Korea's Black Racism Epidemic

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