Corée du Sud : Un Français chez les rois de la boulangerie

L'opération tient du miracle. Devant la grande plage d'Haeundae, au sud de la Corée du Sud ce week-end, l'heure était à la multiplication des petit pains et à la distribution de brioches. Un geste commercial destiné a accompagner l'ouverture du deuxième restaurant Brioche Dorée sur un marché hyper concurrentiel. En dix ans, les Coréens sont passés du thé au café et du riz aux croissants, avec le succès que l'on connaît. Il a donc fallu s'adapter... Outre les viennoiseries, le boulanger français propose ici, des pâtes au pistou et de la choucroute alsacienne.

 

 
Est-ce le début d'une reconquête pour la boulangerie française en Asie ? La chose avait en tous cas agacé Martine Aubry, représentante spéciale pour la Chine du ministre des Affaires étrangères, lors de ses dernières visites à Pékin (cf. soundcloud ci-dessous). En quelques années, les Coréens sont en effet devenus les rois de la baguette industrielle avec des enseignes qui ne cachent, ni leurs références hexagonales, ni leur appétit planétaire. Paris Baguette, Paris Croissant, Tous les jours disposent de filiales dans toutes les mégalopoles chinoises, ainsi que dans la plupart des grandes villes américaines.

Gaufres fines au croissant

Après l'ouverture d'un premier restaurant à Séoul en octobre 2013, un autre à Yokohama en avril 2014,  l'enseigne Brioche Dorée est désormais installée à Pusan, la deuxième ville de Corée du Sud. « On a pensé que c'était le bon moment explique Hervé Pichard, chef boulanger basé au Japon. Cinq ans avant ça n'aurait pas été le 'pays des boulangers' comme certains le disent aujourd'hui. Arriver trot tôt n'est pas forcément une garantie de succès : Les Coréens sont maintenant prêts à accepter nos produits, ils peuvent comparer pour se rendre compte de la qualité. » Une allusion à la concurrence et probablement à Paul qui a dû quitter Shanghai (2010) et Séoul (2013), et qui tente aujourd'hui de faire son retour en Chine.

Martine Aubry / Boulangerie française et la Chine / RFI janvier 2014 by Stéphane Lagarde

 
Si les Coréens ont longtemps préféré le pain de mie et les farines sucrées, aujourd'hui les goûts se sont considérablement étendus. Brioche Dorée a malgré tout dû adapter son offre. L'enseigne située face à la mer, non loin des grands hôtels d'Haeundae, entend en effet accueillir les touristes de la station balnéaire jusque tard le soir : « Il était nécessaire de faire du service à table et d'avoir une offre restauration beaucoup plus large que celle que nous avons à Paris souligne Laurence Ledoux. La gamme est aussi fonction de l'emplacement poursuit la directrice des opérations du groupe Le Duff basée à Shanghai. Au Japon par exemple, on est plus sur du flux et donc dans une organisation plus standard, car on est situé dans la gare de Yokohama. »
 
 
 
Coffrages en bois brut et abats jours rouges viennent rappeler les restaurants parisiens, mais pour le reste on est très couleur locale. Et ici, on ne vient pas que pour bruncher ! « Les portions sont plus grandes affirme Hervé Pichard, les Coréens mangent bien plus que les Japonais. » Dans les assiettes, des « tartines poulet au curry », une « choucroute alsacienne », des « galettes de pommes de terre au saumon », des « cuisses de poulet marinées et saucisses », des « spaghettis au pistou provençal », des « œufs pochés avec galettes de pommes de terre »... La spécialité locale étant les « gaufres fines » à base de mâche de croissant, une invention du chef coréen en cuisine.

Daewoo à la baguette 

Le nouveau restaurant de Pusan compte 92 places assises et une trentaine d'employés pour la saison estivale. Tous ont été recrutés et formés par le partenaire local, car si les deux enseignes de la marque à Shanghai sont des succursales, la stratégie est désormais au développement de franchises et donc à la recherche d'associés locaux. Le groupe Pronto/Suntory au Japon et Daewoo construction en Corée. Le contrat avec le conglomérat sud-coréen a été signé il y a un an et ½ avec pour objectif de développer 80 restaurants sur dix ans. 105 sont prévus au Japon. Et la Chine ? « La recherche d'un partenaire chinois devrait être finalisée dans les deux à trois ans indique Laurence Ledoux. C'est très important d'avoir des partenaires qui connaissent le marché local et les emplacements. Je pense qu'on peut apporter notre culture et notre savoir faire, sachant que tous les produits viennent de France via notre centrale de production Bridor. »
 

Laurence Ledoux et Hervé Pichard 

 
L’appétit de l'Asie pour le pain et les croissants accompagne la montée en gamme des produits. Outre les chaînes de boulangeries industrielles, les artisans boulangers européens et notamment français installés en Corée, ainsi que de nombreuses boulangeries artisanales coréennes proposent désormais du pain frais. Exemple à Pusan où le boulanger OPS propose, entre autres, d'excellents croissants au levain. La musique française dans les haut-parleurs accompagnant malheureusement dans le cas précis un accueil très « parisien » diront les mauvaises langues, avec un service prétentieux et désagréable auquel on était peu habitué jusqu'à présent en Corée. Atmosphère heureusement totalement différente pour l'ouverture de la Brioche Dorée quelques rues plus loin. Malgré la pression des débuts et les ajustements de dernières minutes, les sourires étaient bien au rendez-vous pour l'ouverture de la deuxième enseigne du groupe français ce week-end. Et si tous les produits viennent de France par avion, si la pâte est surgelée à l'arrivée, on se dit que c'est le prix à payer pour avoir la même baguette et les mêmes croissants qu'à... Paris.
 
 
 

A lire chez les confrères :

 

Forbes 23 juillet 2014 Mon Dieu, Korea's Paris Baguette Is Now A Real Parisian Boulangerie

 

2 Comments

Article tres interessant. La Coree s'est beaucoup transformee les dernieres annees. Quand j'etais petite, les cereales et le pain, il n'y en avait pas au petit dejeuner. Maintenant les Coreens et surtout les Coreennes adorent le cafe.

je veux un croissant!

http://toutsurlachine.com